31/05/2022

La femme qui valait trois milliards, Boris Dokmak

La femme qui valait trois milliards, Boris Dokmak

Ecrit par Patryck Froissart 26.09.13 dans La Une LivresLes LivresCritiquesPolarsRoman

La femme qui valait trois milliards, Editions Ring, Collection Ring Noir, avril 2013, 638 pages, 21 €

Ecrivain(s): Boris Dokmak

La femme qui valait trois milliards, Boris Dokmak

 

Monumental thriller à l’américaine, écrit par un auteur français né en Ukraine.

2013, coup de tonnerre dans l’actualité « pipole » : Paris Hilton, vedette à scandales, a disparu… Comment est-ce possible ? L’opinion est divisée : on y croit, on n’y croit pas, coup publicitaire, suicide, meurtre, enlèvement, isolement volontaire ?

Alors imaginez Paris Hilton, la plus connue des stars, sans cesse survolée, poursuivie, filmée, photographiée… et par ailleurs toujours accompagnée par deux gardes du corps : comment aurait-elle pu disparaître… ?

2023, de Hollywood, le père de Paris Hilton lance à la recherche de sa fille Albert Almayer, détective privé alcoolique et misanthrope qu’il a fait kidnapper au milieu de la mer d’Oman…

Je veux que vous la cherchiez ; je veux que vous la retrouviez ; je veux qu’à terme vous me la rameniez… Je veux que ma fille Paris rejaillisse, pure et immaculée, de tout ce putain de fumier…

2023, à Bruges, le lieutenant de police Joris Borluut est appelé à se rendre dans un bâtiment désaffecté où il découvre le cadavre étonnamment rose et frais d’une belle jeune femme morte depuis un bon bout de temps, Godelieve Hildebrant, qui semble avoir été embaumée vivante…

Pas de plaie, pas d’arme, pas de sang, pas de cris au secours, pas de témoignage direct… Rien, dans cette mort offerte, dans cette morte exhibée, ne montrait de la violence ou de la brutalité…

L’assassinat comme une œuvre d’art…

2100 avant JC, Egypte, XIIe dynastie, un naufragé débarque sur l’île de Tofar, où vit un vieil homme qui lui raconte son étrange histoire.

Le premier matin de la septième semaine, on apprêta la veuve. Elle but la potion pendant que des dizaines de servants lui frottaient la peau avec les onguents de la grande prêtresse. […] Mais ses joues restaient roses et brillantes… Mon corps s’est altéré alors que celui de mon épouse… resplendit comme au premier jour…

1952, Joseph Djougachvili Staline va mal… Il va mourir bientôt…

Il ne veut pas moisir…

Sur 638 pages, Boris Dokmak distille petite pièce par petite pièce un puzzle immense qui couvre quatre millénaires et s’éparpille ainsi de Bruges à la Californie, de Los Angeles à Moscou en passant par Saint-Pétersbourg, Milan et bien d’autres lieux.

Faisant montre d’une imagination débridée, l’auteur organise une suite galopante d’événements, de révélations, de découvertes conduisant le lecteur sur des pistes dont il semble impossible qu’elles se rejoignent un jour pour ouvrir la voie à la vérité, et dont certaines paraissent aboutir à de décourageants culs-de-sac.

Une immense toile d’araignée est ainsi savamment tissée par l’auteur à travers l’espace et le temps, toile dont les ramifications, les nœuds et la cohérence globale n’apparaissent que peu à peu, l’intention de Boris Dokmak étant évidemment d’entretenir le suspens jusqu’au terme du roman.

Les amateurs du genre se laisseront porter avec bonheur dans les méandres, les lacs et les entrelacs de ce premier roman, dont le titre est un clin d’œil à celui d’une célèbre série télévisée américaine, et qui laisse espérer qu’il ne sera pas le dernier.

 

Patryck Froissart

 

 

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Les nuits de Vladivostok, Christian Garcin

Les nuits de Vladivostok, Christian Garcin

Ecrit par Patryck Froissart 08.06.13 dans La Une LivresLes LivresRecensionsRomanStock

Les nuits de Vladivostok, janvier 2013, 360 pages, 20,50 €

Ecrivain(s): Christian Garcin Edition: Stock

Les nuits de Vladivostok, Christian Garcin

 

Par quel hasard le Français Thomas Rawicz, sorte de rêveur poète aventurier, se retrouve-t-il, sans l’avoir voulu, à Vladivostok, alors qu’il croyait avoir pris un train pour rejoindre son épouse Marie à des milliers de kilomètres de là ?

Sur quel quiproquo les Chinois Zuo Luo et Chen Wanglin, justiciers volontaires, chasseurs de proxénètes, croisent-ils le chemin de Rawicz en une rencontre pour le moins violente ?

Quelle force occulte transforme-t-elle l’antagonisme initial entre les deux Chinois et le Français en un protagonisme qui les amène à ne plus se quitter sur la piste d’un mystérieux criminel nommé Thomas Krawczyk ?

Quel est l’obscur dessein du destinateur qui, de Moscou, fait aboutir le long et fou périple pédestre d’Oleg Svechnikov à Vladivostok, tout droit en les lieux que sillonnent les deux Chinois ?

Quel mystérieux génie réunit cependant sur les bords du lac Baïkal, très loin de Vladivostok, Marie, l’épouse de Thomas Rawicz, et deux femmes étranges que chacun des personnages présentés ci-dessus a croisées à un moment ou à un autre de sa vie, deux dames au contact de qui s’installe une atmosphère fantastique à la Edgar Poe, deux créatures qui lisent dans les pensées et semblent tout connaître des relations existant ou étant sur le point d’exister entre tous les acteurs du drame qui est en train de se nouer ?

Quel lien unit l’insaisissable Thomas Krawczyk, que les Chinois traquent dans Vladivostok, et le roi des bandits américains José Ortiz, qui dirige, depuis sa crypte située au cinquième niveau des douze étages souterrains dans lesquels vit sous New-York une pègre grouillante et inquiétante, un nébuleux réseau criminel mondial ?

On pourrait croire, à la lecture de ces interrogations, que Christian Garcin a produit ici un roman noir.

Il n’en est rien.

Si le lecteur est suspendu, de la première à la dernière page, au fil du récit, ce n’est pas par l’envie de connaître le résultat d’une enquête policière dont la relation serait particulièrement propice à le tenir en haleine.

Non ! Si le roman de Christian Garcin passionne, prend, et ne lâche plus, c’est dû au maillage que l’auteur trame avec une rare ingéniosité et une évidente perversité autour du lecteur qui, pris au piège des labyrinthes de l’histoire, est forcé, s’il veut s’en dépêtrer, d’aller de l’avant, à l’aveuglette, en s’efforçant de résoudre les énigmes qui sont judicieusement (vicieusement ?) placées une par une sur son chemin.

« Pour tout dire, ce genre de scénario invraisemblable m’amusait assez… ».

Christian Garcin, de Vladivostok à New-York, nous entraîne dans un captivant jeu de (fausses) pistes, dont l’entrelacs est rendu encore plus inextricable par l’entrecroisement parallèle des voix, provoqué par le brusque passage d’un narrateur à un autre. Ses personnages semblent eux-mêmes se rendre compte du caractère apparemment aléatoire de leur histoire :

« Cette coïncidence n’étonnait pas vraiment Wanglin, tant il était persuadé que nous ne sommes au bout du compte que le jouet de forces aussi neutres qu’impeccablement structurées, dont l’entendement se situe très loin hors de notre portée… ».

En une sorte de fonction méta-narrative, l’auteur livre, dans les discours de ses personnages, des indications, sème des indices sur la nature de son dessein littéraire :

« Et qu’aimerais-tu écrire ? Des romans ? Des poèmes ?

– Je ne sais pas, dit Irina. Je ne suis pas sûre qu’on choisisse vraiment. Ce qui viendra à moi. Peut-être des romans aux allures de poèmes. Ou l’inverse : des poèmes bâtis comme des romans. Des histoires petites et douces. Ou remplies de carnages effroyables. Ou les deux à la fois… ».

Tout le fantastique de ce roman envoûtant est inscrit en ces lignes !

 

Patryck Froissart

 

 

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La vie de Marie, Rainer Maria Rilke

La vie de Marie, Rainer Maria Rilke

Ecrit par Patryck Froissart 12.06.13 dans La Une LivresLes LivresRecensionsLangue allemandeArfuyenPoésie

La Vie de Marie, traduit de l’allemand par Claire Lucques, Edition bilingue, 88 pages, 11 €

Ecrivain(s): Rainer Maria Rilke Edition: Arfuyen

La vie de Marie, Rainer Maria Rilke

 

Cet ouvrage précieux présente en treize tableaux poétiques, disposés chronologiquement, la vie de Marie de sa naissance à sa mort.

Face au texte original en allemand, l’excellente traduction de Claire Lucques, qui réussit à en rendre au mieux l’esprit, la lettre et la force poétique, permet au lecteur non initié à la langue de Goethe d’entrer dans le monde torturé de Rainer Maria Rilke et d’en ressentir toute la puissance lyrique.

Mais l’édition bilingue offre à ceux qui ont la chance de pouvoir lire ces poèmes dans le texte initial, qu’ils soient croyants ou non, la possibilité d’une communion particulièrement intense, voire bouleversante, par-delà les années et au-delà de la mort du poète, avec l’âme de Rilke le mystique.

Dès la première strophe s’annonce le souffle poétique qui a inspiré le poète tout au long de ces treize compositions.

O was muß es die Engel gekostet haben,

nicht aufzusingen plötzlich, wie man aufweint,

die sie doch wußten : in dieser Nacht wird dem Knaben

die Mutter geboren, dem Einen, der bald erscheint.

 

Le texte peut être lu, compris, interprété, partagé sur deux niveaux.

En y entrant comme en un temple, avec l’humilité ou la ferveur que confère la foi, on éprouvera, ligne après ligne, en totale empathie, l’extase de Rainer devant la sainteté, la déité, et la pureté de Marie, et on visitera l’opuscule avec vénération, avec des pauses de recueillement, ayant constamment devant les yeux, projetée avec éclat par le verbe éblouissant du poète, la personne divine de la Mère de Jésus telle que dut ou crut la voir Bernadette Soubirous.

Le vertige devant le prodige est insufflé par l’auteur, qui l’impose au lecteur en s’adressant directement à lui :

 

Pour comprendre comment elle était alors

tu dois évoquer d’abord un lieu

où des colonnes en toi s’élèvent, des marches

se sentent sous les pas, des arches vertigineuses

enjambent l’abîme d’un espace qui en toi

est resté…

 

En l’abordant comme une œuvre profane, avec la simple curiosité ou l’appétence de l’amateur de belles-lettres, on ressentira, en pleine affinité, la tristesse de Rilke évoquant la simplicité, les affres maternelles et l’esprit de sacrifice de Marie, et on parcourra le recueil avec l’émerveillement que procure la perfection d’un superbe cantique et la compassion que font naître inévitablement chez le lecteur les lamentations de la mater dolorosa.

 

Jetzt wird mein Elend voll, und namenlos

erfüllt es mich. Ich starre wie des Steins

Inneres starrt…

 

Ce livre est de ceux qu’on laisse en permanence sur sa table de chevet pour en savourer un morceau au hasard avant de s’endormir, comme le fait de sa Bible l’homme pieux.

La présentation savante que donne Claire Lucques en préface à ce cycle poétique, ainsi que la biographie de Rilke et les notes qui figurent à la fin du livre, aident à cerner la poétique rilkienne, l’ensemble pouvant constituer un bel « objet » d’étude littéraire.

 

Patryck Froissart

 

 

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La rage entre les dents, Soeuf Elbadawi

La rage entre les dents, Soeuf Elbadawi

Ecrit par Patryck Froissart 17.06.13 dans La Une LivresLes LivresRecensionsPoésieVents d'ailleurs

La rage entre les dents, Un dhikri pour nos morts, 2013, 70 pages, 9 €

Ecrivain(s): Soeuf Elbadawi Edition: Vents d'ailleurs

La rage entre les dents, Soeuf Elbadawi

 

Le kwasa kwasa… C’est quoi ça ? C’est une danse africaine très chaloupée.

Les kwasa kwasa, par métonymie, sont ces barques minuscules où embarquent au péril de leur vie chaque année des milliers d’habitants des îles comoriennes d’Anjouan et de Mohéli pour tenter de gagner clandestinement l’île voisine, Mayotte, ô mirage ! demeurée française après l’indépendance de l’archipel.

Le dhikri est la stance cadencée et lancinante qu’adresse à Allah le soufi en transe.

Quand un poète militant mêle en un long chant de révolte les transports que connotent ces trois référents, cela donne La rage entre les dents.

L’auteur, metteur en scène et comédien, exprime en une litanie de versets lyriques et déclamatoires, destinés à être dits sur une scène de théâtre, sa souffrance et celle de son peuple qui vit au quotidien la tragédie des kwasa kwasa sombrant dans l’océan en allant se heurter à cet autre mur de la honte qui le sépare de ses cousins mahorais :

« ce mur dont je vous parle Erigé en nos eaux par la lointaine République de Paris est le résultat d’une politique de désespérance remontant aux premiers émois de la colonie… ».

C’est ce cousinage entre insulaires que personnifie le personnage central, parti plein d’espoir sur un kwasa qu’une lame océane a fracassé contre le mur :

« cette nuit ils ont annoncé la mort d’un des miens

mon cousin happé par la vague broyé par les flots »

L’écriture, poétique, délivrée de toute forme de ponctuation, est toutefois jalonnée de part en part de majuscules pouvant constituer, avec les blancs qui marquent le découpage en versets de 6 à 10 lignes, des repères permettant de délimiter des groupes de souffle pour la diction ou des ensembles sémantiques pour la lecture.

Des phrases en shikomor (langue comorienne) ou des citations en arabe (celles-ci extraites du Coran) apparaissent brusquement au milieu du texte en français, sans séparation, sans traduction, comme si la langue héritée de la colonisation devenait ça et là incapable de traduire la montée en puissance récurrente du cri protestataire qui, lorsqu’il sort du tréfonds des tripes, n’est plus exprimable que dans la langue maternelle.

« j’ai donc repris le chapelet d’une main leste et droite pour entamer le dhikri de la dernière illusion ma rage entre les dents Le vaste monde tendant l’oreille sous les spots rallumés d’un écran satellitaire Une devinette en absolu se pose sur le fil de la haine distillée entre deux rives Upwa nuandu tsi nyangu wela djapizo Nasi rili djapizo Qui l’on couillonne dans le mépris s’enroule dans la soie du pauvre ».

La révolte tourne, comme l’annonce le titre, à la rage lorsque le poète engagé, enragé par son impuissance, s’adresse à l’ancienne puissance coloniale (dite la Puissance dévastatrice) qui impose toujours sa loi dans l’archipel, ou aux instances internationales que la tragédie comorienne laisse indifférentes, ou encore au Dieu en qui il a cru mais qui reste sourd à ses prières :

« quel crime avons-nous commis unhm Quel crime unhm pour mériter un tel sort Qu’Il nous le dise Lui qui est au-dessus de tout et qui sait tout Fabi ayyi aalaa’i Rwabbikuma tukadhibani Lequel des bienfaits de votre Seigneur nierez-vous C’est écrit dans son Livre Je n’invente rien Qu’il nous dise alors Son silence sur les morts en kwasa est-il un bien ou un mal pour les oubliés du land of Loose ».

Voilà un livre poignant, incantatoire, qui incite le lecteur à rejoindre l’auteur dans le juste combat qu’il mène, dans l’ensemble de son œuvre, pour que les Comoriens, les Gens du boutre, retrouvent leur droit historique de circuler librement d’une île à l’autre de cet archipel dont l’ensemble constitue pour eux la terre ancestrale une et indivisible.

Rien ne fera taire Soeuf Elbadawi, il s’y engage, jusqu’à ce que sa voix fasse sauter le couvercle de plomb qui pèse sur l’incessant ballet dramatique des kwasa.

« la vérité sera scandée au péril de nos vies »

 

Patryck Froissart

 

 

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Sans rémission, Justine Jotham

Sans rémission, Justine Jotham

Ecrit par Patryck Froissart 25.06.13 dans La Une LivresLes LivresRecensionsRoman

Sans rémission, Airvey Editions, mars 2013, 73 pages, 8,50 €

Ecrivain(s): Justine Jotham

Sans rémission, Justine Jotham

 

Sans rémission est un court roman au rythme rapide au fil duquel l’auteure imagine les dix derniers jours du monde avant la fin annoncée de notre planète.

La chronique de ces dix jours d’avant l’apocalypse est faite par le personnage narrateur, Phil, qui, cancéreux, condamné par ses médecins, n’ayant plus que quelques jours à vivre, a fui son lit d’hôpital avec la complicité d’une infirmière dès que la nouvelle de la date de l’explosion finale a été diffusée par les médias.

De J-10 à J, Phil, désabusé, observe ce qui se passe dans sa rue et dans son quartier, parfois en les parcourant, le plus souvent de la fenêtre de son petit appartement.

« Moi, je continue comme si de rien n’était. Je ne suis qu’un vulgaire spectateur du cataclysme, je ne fais qu’observer et écouter, je ne participe pas à l’angoisse environnante… »

Ce point de vue extérieur, distant, qui se voudrait dépourvu d’émotions, d’un homme qui se sait doublement en sursis, permet à l’auteure d’extrapoler sur la propension de l’homme à régresser, à retourner vers l’état primitif sitôt que se délite le contrat social.

Pour Justine Jotham, il est évident que ce retour quasi immédiat à l’état de nature se réalise a contrario de l’image du bon sauvage développée par les philosophes du siècle des Lumières.

Une fois assurées que la prompte déliquescence de toute forme d’autorité leur garantira la totale impunité, les populations se déchaînent. Alors les collectivités se dissolvent, les communautés se désintègrent, les familles se désagrègent : chaque individu n’aspire plus qu’à assouvir les plus abjects de ses instincts.

Copulations effrénées, viols, vengeances, meurtres gratuits : on retrouve sous la plume de Justine Jotham cette atmosphère de totale désespérance et toute la litanie de ces scènes de folie furieuse dont on nous dit que des villes frappées par la peste ou le choléra ont été jadis le théâtre.

Au milieu des hordes destructrices et assoiffées de violence qui déferlent, massacrant et pillant, dans la rue jonchée de bris et débris de toutes sortes, un enfant vient spontanément à Phil, un oiseau blessé, qui se plaint « sans haine » :

« C’est là (…) qu’habite le …vi-vi-vi-vilain monsieur qui m’a tapé de… de… dessus ». Il tend la main dans une autre direction : « Et là, c’est… c’est… c’est lui qui m’a dit d’aller crever plus loin ».

Leurs chemins se séparent, mais quand viendra l’heure ultime, l’enfant rejoindra Phil…

Que signifiera cette présence pour le mourant ?

 

Patryck Froissart

 

 

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Coup de sang, Enrique Serna

Coup de sang, Enrique Serna

Ecrit par Patryck Froissart 05.07.13 dans La Une LivresLes LivresAmérique LatineRecensionsRomanMétailié

Coup de sang (La sangre erguida), traduit de l’espagnol (Mexique) par François Gaudry, avril 2013, 335 pages, 20 €

Ecrivain(s): Enrique Serna Edition: Métailié

Coup de sang, Enrique Serna

 

Bulmaro Diaz, alias Amador Bravo, a pour habitude de dialoguer avec son sexe. Le roman débute sur une période de relations tendues entre eux deux. Bulmaro en effet accuse son alter ego d’avoir fait preuve d’une concupiscence scandaleusement égocentrique lorsqu’il l’a obligé à quitter sa famille et à abandonner l’affaire prospère de mécanique générale qu’il possédait à Vera Cruz pour suivre à Barcelone Romalia, une chanteuse peu talentueuse mais fort voluptueuse :

« Ce que je ne te pardonne pas, c’est de m’avoir fait céder quand Romalia m’a annoncé à grand renfort de trompettes qu’on venait de lui proposer de chanter comme soliste dans un club de salsa à Barcelone ».

Juan Luis Kerlow a lâché ses études de biomédecine au grand dam de sa famille d’intellectuels pour faire une brillante carrière d’acteur du porno à Los Angeles. Il entre en scène en ce roman au moment où les producteurs, à la recherche de nouveaux talents, commencent à le laisser sur la touche. Par défaut, il accepte un contrat médiocre de cinq films sur un an à Barcelone.

« L’offre financière n’était pas très tentante : la moitié de ce qu’il gagnait pour un seul film pendant ses années de gloire… ».

Ferràn Miralles est cadre dans « une des agences immobilières les plus réputées de Barcelone ». Quadragénaire considéré comme très séduisant, il est impuissant depuis une première expérience sexuelle ratée avec une copine de lycée qui l’a dès le lendemain ridiculisé devant toute l’école.

« Je n’étais pas un petit vieux avec des problèmes de voies urinaires : j’étais un névrosé impuissant, c’est-à-dire une victime de ses propres démons ».

On l’aura compris, la vie sexuelle de ces trois hommes converge vers Barcelone, où ils vont se rencontrer et partager une triple descente en enfer.

La construction du roman alterne de façon régulière les épisodes de la vie de chacun des trois personnages, sous la forme de narration à la troisième personne pour ce qui concerne Bulmaro et Juan Luis alors que Ferràn se raconte, du fond d’une cellule de prison, à son médecin.

L’auteur entretenant soigneusement le suspense, ne donnant aucun indice qui permette de comprendre les raisons pour lesquelles ces trois destins se déroulent en parallèle, le lecteur, perplexe, persuadé que, par convention littéraire, l’intersection narrative finira par se produire, est captif, pris dans le courant, poussé en avant.

Sans dévoiler les ressorts de cette triple intrigue, on peut souligner que l’art de l’auteur se fonde sur un artifice astucieux : Juan Luis, le champion de la copulation à répétition, perd d’un coup toute capacité en la matière au moment où Ferràn, l’inhibé chronique, trouve tout aussi soudainement le moyen de se transformer à volonté en un fougueux étalon.

Toute construction en chiasme tourne autour d’un axe : ce rôle central de pivot est tenu par Bulmaro qui, pour subvenir aux besoins de sa chanteuse, est contraint de se livrer à des trafics illicites.

L’expression crue (sans obscénité), la récurrence et la précision des scènes d’accouplement (sans pornographie), l’humour omniprésent, décapant (sans vulgarité), la violence de nombreux dialogues (sans outrance), le vaudeville (réaliste) caractérisent en surface ce roman tragi-comique, et expriment en profondeur la piètre opinion que semble avoir l’auteur d’une société où la puissance est indissociable de l’argent, où la richesse matérielle est considérée comme unique condition au bonheur, où prime le souci, pour chaque individu, de satisfaire son SURMOI, ses instincts, ses pulsions, ses désirs, son envie d’assurer son pouvoir sur autrui.

 

Patryck Froissart

 

 

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29/05/2022

Ches poriaux du gardin au gratin

Bon!

T'as pus foncque à daller querr' les poriaux, et j' vas t'in faire préparer aujord'hui à l' mod' d' m' mémère Augusta.

Pindint 20 mn, te cuis à l'iau boulante et salée 1 kg d' poriaux equ' t'as néttiés et findus in deux par el' mitan.

Eun' fos cuits, te z'é laiche réchuer jusqu'à c'qu'i seuch'nt bin égoutés.

Là, te prinds eun' pinte ed' bière blonde, t'in bos eun' mitan, pis l'aut' mitan, te l'mets à cauffer !

Dins eun' cass'trole, te fait fond' 50 gr ed' burre, te saupoud's là d'dins 40 gr ed' fareine, te toulles pour point qu' cha attaque ech' fond, et te laiches cuire 2 à 3 mn.

Achteure, accoute me bin sinon te vas cor' dire equ' t'as point compris... Te balles ed' dins : l' demi pinte ed' bière (cheull' equ' t'as point bue et qu't'as fait cauffer), un monet d'poif', eune' ziqu' ed' sé, te rajoutes 180 gr ed' gruyère copé in fine lamelles, et te laiches mitoner pindant 5 mn.

Bon, ach'teure', ch'est l' momint ed' déflaquer tes porieaux dins l' fond d'un plat in terre equ' t'as point eu les troulles ed' bin graicher au burre.

T'arcoeuv's tes poriaux aveuc et' sauce equ' t'as préparée et te laiches gratiner au four pindant 10 mn.

Te sers cha tout caud et te verras qu' ch' est gramint meilleux qu' del' soup' à caillaux !

Relevé dins l' minger à l' bière de José Ambre

08:47 Écrit par Patryck Froissart dans Chez les Chtis | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook | | | |  Imprimer | Pin it! |

Les bienheureux, de Patryck Froissart Préface de Marc Durin-Valois

LES BIENHEUREUX


Patryck Froissart

PREFACE de MARC DURIN-VALOIS

 

couverture redimensionnée.jpgEcrire des nouvelles est un art compliqué. L’histoire de ce genre littéraire est néanmoins ponctuée de splendeurs. Mais à vouloir faire court, on longe un précipice, celui de la caricature. Une des explications de la bouderie actuelle du public pour le genre tient au fait que certains écrivains ont pensé que produire une série de dix nouvelles sur quinze pages était plus aisé que de développer un roman sur cent cinquante. Un peu comme si le cent mètres exigeait moins d’efforts que la course de fond au motif que la distance était plus courte. D’où des tentatives qui ont lassé des lecteurs souvent bien disposés mais égarés dans des machins littéraires peu convaincants. Car la nouvelle a ceci de particulier qu’elle est l’art de l’inachevé. Chacune de ses séquences, je dirai même chacune de ses phrases, doit ouvrir sur un espace littéraire qui n’existe pas, qui n’est jamais écrit mais qui se dessine en filigrane dans l’esprit du liseur. L’exercice est d’autant plus subtil que ce champ –en quelque sorte l’ombre portée du texte- ne s’approche pas à travers un vocabulaire flou, indécis. Ce serait trop facile. C’est la précision du propos, la finesse de la trame qui libère cet espace. La nouvelle est donc le départ de quelque chose, jamais un aboutissement. Sa dernière phrase ne referme pas un texte, elle l’ouvre en indiquant une orientation pour errer dans un imaginaire qu’elle fait émerger à travers le fil invisible qui traverse le recueil. Car c’est là l’autre difficulté de la chose : une nouvelle ne se suffit pas à elle-même. Elle tisse des liens secrets, suscite des résonances puissantes avec les autres récits du même opus. En ce sens, non seulement elle ne duplique pas la construction littéraire sur des formats courts mais elle l’inverse et la refaçonne. Dans « Les bienheureux », Patryck Froissart nous en livre une démonstration foisonnante. Les femmes y dévorent les hommes avec un sourire doux, amusé et sensuel. Toutes dialoguent entre elles, d’une histoire à l’autre, dans un dialogue qui n’est jamais écrit, ou même évoqué. Au gré des lecteurs, l’une ou l’autre image de ces diaboliques s’imposera plus fortement. Mais celles des deux filles malicieuses du garagiste envoyant les automobilistes ad patres, de la sublime domestique Indranee posant son pied sur le dos d’un cadre français fasciné, ou encore celle, lancinante de Stéphanie, vampirisant le talent d’un écrivain en lui offrant en échange ses seins à lécher, n’ont pas fini de nous hanter.

Marc Durin-Valois

 

Marc Durin-Valois figure parmi les romanciers inscrits dans une littérature française ouverte sur le monde et notamment les États-Unis et l'Afrique où l’auteur a passé sa jeunesse.
Il est notamment l'auteur de "l'Empire des solitudes" (JC Lattes), Prix de la Rochefoucauld, de "Chamelle" (JC Lattes), Prix National des Bibliothèques et Prix de la Francophonie, porté au cinéma par la réalisatrice Marion Hansel, et de "La dernière nuit de Claude Eatherly" (Ed Plon), paru lors de la dernière rentrée littéraire.

 

08:45 Écrit par Patryck Froissart dans Critiques de mes livres | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook | | | |  Imprimer | Pin it! |

La première chose qu’on regarde, Grégoire Delacourt

La première chose qu’on regarde, Grégoire Delacourt

Ecrit par Patryck Froissart 17.05.13 dans La Une LivresLes LivresRecensionsJean-Claude Lattès

La première chose qu'on regarde, mars 2013, 264 pages, 17 €

Ecrivain(s): Grégoire Delacourt Edition: Jean-Claude Lattès

La première chose qu’on regarde, Grégoire Delacourt

 

« Arthur Dreyfuss aimait les gros seins ». C’est par cette phrase déclarative et définitive que commence le roman, présentation on ne peut plus directe du personnage principal et du trait essentiel de son caractère.

Son attirance, depuis toujours, pour cette partie de l’anatomie féminine, « la première chose qu’on regarde », n’empêche pas Arthur de mener une scolarité normale, et de devenir bon mécanicien chez le garagiste Payen, après une enfance marquée par de terribles épreuves : la mort de sa sœur Noiya dévorée par le chien du voisin, l’absence de son père parti quelque temps après dans la forêt pour n’en plus jamais revenir, et la dégénérescence éthylique de sa mère jamais remise de la mort atroce de Noiya et de la disparition consécutive de son mari.

« Arthur Dreyfuss aimait les gros seins ».

Le sachant, on imagine dans quel état le met l’apparition, un soir, alors qu’il ouvre la porte de son humble maison à laquelle on a toqué, de Scarlett Johansson, la célèbre star « qui rapporta le titre de plus belle poitrine d’Hollywood, décerné par la chaîne américaine Access Hollywood (pour les curieux et les amateurs, Salma Hayek arriva en deuxième position, Halle Berry en troisième, Jessica Simpson en quatrième et Jennifer Love Hewitt en cinquième)… ».

Commence alors une prenante et surprenante histoire, un tendre et émouvant délire, une sorte de dérive fusionnelle, une espèce de fugue amoureuse, une fantaisie aussi passionnelle que touchante, souvent ingénue et poétique, sur fond de références filmographiques hollywoodiennes de ces vingt dernières années et d’extraits de poèmes de Jean Follain, dont Arthur a trouvé un recueil oublié au garage par une cliente.

La romance toutefois est hérissée, ici et là, de piques sur le monde épineux du cinéma, sur les jalousies latentes qui y règnent entre les stars, l’hypocrisie de leur entourage, le harcèlement des paparazzis. Ce monde-là est une jungle.

Les dialogues entre Arthur et son idole sont tantôt touchants, lorsque le narrateur rapporte les déclarations candides, voire naïves, que s’adressent les deux personnages qui s’enclosent dans leur bulle amoureuse, tantôt bouleversants, quand les protagonistes se racontent les épisodes douloureux de leurs passé de misère.

L’auteur crée le suspens, entretient le flou, mêle rêve, illusion, réalité, joue sur les ressemblances, installe la supercherie, superpose les sosies, met du cinéma, de la poésie et de la sensualité, introduit et enchevêtre songe et mensonge dans la vie d’Arthur et de sa compagne inespérée.

Emmené dans ce méli-mélo astucieusement construit, le lecteur ne s’ennuie guère.

« Le mensonge fait son nid partout », commente le narrateur.

Oui, mais le mensonge peut créer le bonheur.

Question : le bonheur, quel que soit l’événement qui le fonde, est-il durable ?

Grégoire Delacourt donne sa réponse, à la fin de ce livre étonnant et détonnant.

 

Patryck Froissart

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On s'embrasse pas ? Michel Monnereau

On s'embrasse pas ? Michel Monnereau

Ecrit par Patryck Froissart 22.04.13 dans La Une LivresLes LivresRecensionsRomanJ'ai lu (Flammarion)

On s’embrasse pas ?, février 2013, 191 pages, 5 €

Ecrivain(s): Michel Monnereau Edition: J'ai lu (Flammarion)

On s'embrasse pas ? Michel Monnereau

 

Familles, je vous hais !

Le cri de Gide ne peut pas ne pas venir à l’esprit de qui pénètre en cet âpre roman !

Le narrateur, Bernard, revient dans la maison natale, dans un hameau de la France profonde, où, adolescent, il étouffait, d’où il est parti, quinze ans plus tôt, pour respirer, pour changer d’air, quasiment sans adieu, sans se retourner, laissant derrière lui désemparés puis désespérés son père, sa mère, et sa sœur.

Bernard revient après avoir roulé, sans but, dans l’esprit du mouvement hippie, sans s’être jamais arrêté nulle part, en ayant évité toute dérogation à la règle qu’il s’était fixée de n’accepter aucune contrainte, en ayant repoussé toute compromission avec le contrat travail-consommation du système capitaliste, « refusant d’être l’écureuil captif qui fait tourner l’économie ».

Bernard revient, comme il est parti, sur un coup de tête : « Ça m’a pris par quarante-huit degrés cinquante-deux de longitude et deux degrés vingt de latitude, vers minuit »…

Bernard revient dans le village morne où personne ne l’attend plus, où il retrouve d’abord sa sœur Fabienne qui l’accueille avec des reproches et une annonce : « Papa est mort », puis sa mère, terriblement vieillie, qui lui demande : « Pourquoi es-tu revenu ? », et qui l’accuse d’avoir tué son père : « Il est mort de t’attendre ».

Pris dans les mailles des souvenirs, dans la poix des regrets, et dans la pesanteur des reproches, replongé dans le quotidien étriqué qu’il partage péniblement avec une famille qui compte désormais un beau-frère, un beauf, un vrai, et deux nièces, Bernard déprime.

Seule sa nièce Chantal, une adolescente délurée fascinée par l’aventurier qu’il est à ses yeux, dissipe durant quelques jours par la fraîcheur de son jeune corps et par le soleil de son regard la morosité des lieux, jusqu’au moment où, sur le point de céder à la tentation de l’inceste, Bernard la rembarre et se replie dans la solitude de la chambre de son adolescence avec ses bières, ses cigarettes et ses livres.

On eût préféré qu’il ne revînt pas. On lui reproche d’être là, alors que le père n’y est plus. On lui en veut de s’incruster, comme un parasite. Mais on craint qu’il ne reparte, comme quinze ans plus tôt. Que diraient les gens ? Les relations sont tendues, les échanges verbaux sont vifs, acerbes, lourds de sous-entendus.

Et voici que la mère meurt, et que Fabienne prononce un nouvel acte d’accusation : « Sans toi, maman n’aurait pas eu cette attaque ».

Bernard s’isole dans la maison natale, dont il a tacitement hérité, désormais vide de toute présence humaine, mais pleine d’objets, témoins poussiéreux du passé. Chacune des rares rencontres avec sa parentèle, qui vit sa vie terne dans la maison voisine, est l’occasion de nouvelles disputes, de nouvelles accusations (la responsabilité de la fugue de Chantal, partie comme lui un matin sans un mot, lui est bien sûr imputée) jusqu’au jour où, ayant acquis la certitude que le choix qu’il a fait quinze ans plus tôt a été le bon, il ouvre la porte et s’en va droit devant sans la refermer.

La boucle est bouclée.

La narration à la première personne est intimiste, crue, terriblement amère bien qu’empreinte d’humour. On rit, mais on rit jaune. Le regard que porte Bernard sur le monde, sur les événements qui l’agitent, sur la famille, sur soi-même est sans concession. La seule façon de supporter la société est de la fuir, la seule possibilité de s’accommoder de l’existence des autres est de mettre fin à tout commencement d’attachement.

On pourrait conclure, en écho au cri de Gide cité ci-dessus, avec celui de Sartre : L’enfer, c’est les autres !

 

Patryck Froissart

 

 

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